Parc du Bic.

Toutes les bonnes choses ont une fin (sauf le saucisson qui en a deux, mais lui il a une bonne excuse, c’est une chose excellente, et végétarienne de surcroît). Il a bien fallu que je me décolle les foufounes (les fesses, voyons, ne pensez pas à mal) de ce canapé très confortable pour filer à l’anglaise en direction du traversier aux Escoumins. Quarante kilomètres séparent Tadoussac des Escoumins, et la 138 a des côtés vraiment charmants sur ce trajet. 

En 1h30, me voilà de l’autre côté du Saint Laurent, à Trois Pistoles.

Pas grand chose à faire ici, à part des courses (yapu rien à bouffer dans la Gros-buse), hey c’est la teuf, tofu mariné et champignons en promo ! Allez hop, on mélange tout ça dans un joyeux one-pan ! Oui mais… Le tofu mariné, ça daube. Fort. Longtemps. Si l’idée saugrenue vous vient d’en faire chauffer un de ces jours, ne faites pas comme moi; ne cuisinez pas au cul du van, allez (au moins) 30 mètres plus loin. Ma piaule pue. Ma serviette de bain pue. Mes rideaux puent. Bref, j’ai aéré ma caverne.

En photo, le-dit dégât, visuellement pas très présentable, gustativement toutafé respectable. Ne rigolez pas. Vous savez que je cuisine des trucs moches qui vous chatouillent agréablement le palais, estimez vous heureux que je sois la première beta-testeuse de mes conneries culinaires.

Le lendemain, visite du parc naturel du Bic. Tout petit, tout mignon, tout bien entretenu, peu de sentiers balisés par rapport aux autres parcs, mais largement assez. Sa particularité, c’est surtout d’englober une bonne partie marine de la baie du Ha-Ha! (vous pouvez vous marrer là, c’est autorisé), et donc de proposer plusieurs promenades aux accès fluctuant en fonction de la marée. Je profite de la marée basse matinale pour rejoindre l’Ile aux Amours, toute p’tite, toute choupite.

Une tentative d’observation des phoques plus tard, raté, rien à voir, je range les jumelles et m’exporte vers le départ de l’ascension du pic Champlain, qui culmine à, tenez-vous bien et faites sonner les trompettes divines… 350 mètres. Un pic, un cap, ouais gros, un tout petit monticule. 340 mètres de dénivelée + en 3km, on a vu bien pire, je charge le sac photo en mode chameau pour me faire les pieds en prévision du reste. Surtout qu’on m’a parlé d’une superbe vue au sommet.

Après environ 10 clopes crachées pendant la montée (oui je sais faut que j’arrête), j’arrive au-dit point de vue, pose le barda qui doit peser à vue de pif un bon 8 ou 9 kilos (maso j’vous dis), essore mon t-shirt, et tente de prendre quelques photos. Une petite brume s’est installée, c’est pas très funky, mais deux guides de la Sepaq sont là pour parler géologie et biologie dans le parc. Très intéressant. Si vous passez par là, guettez Christophe, c’est une mine de bonnes infos !

Après une descente bien plus rapide, je me rends compte qu’il est déjà 16h et que j’ai rien bouffé aujourd’hui. Mon estomac serait-il repassé en mode warrior ? Assez fière des efforts de la-dite bestiole stomacale, je pense quand même à la remplir un peu avant de continuer ma promenade dans la baie du Ha-Ha!.

La journée se termine et je sens le fennec à 3km, les seules douches dispos dans le coin sont payantes, ça fait chier mais y’a pas trop le choix; en effet, ma douche solaire dans le van n’est pas chargée, et il fait bientôt nuit, aucun moyen de la faire chauffer à part au réchaud, et je vais pas gaspiller du propane pour ça. 1$ pour 4 minutes d’eau chaude, c’est abusé mais tant pis, le défi se relève en une minute chrono. Par souci écolobobobiolochoune, je coupe l’eau pour pas gaspiller et en laisser un peu pour les autres, puis je décalisse direction Matane.


Ne venez pas à Tadoussac !

Enfin, n’y venez pas en pensant rester juste une soirée pour le concert des Caribous Volants à l’auberge de jeunesse. Parce que vous ne resterez pas qu’une soirée. Déjà que les musiciens restent deux jours au lieu d’un, ben… On va rester aussi, tant qu’à faire. Tant pis pour la brume tenace qui bouche toute la vue sur la baie qu’on m’a vendue comme magnifique. 

J’avais dit pas d’auberge de jeunesse puisque je dors dans le van. Mais une petite soirée avec un bistrot et de la musique, ça se refuse pas. De toutes façons, j’irai parquer le van ailleurs pour dormir tranquille.

Je tombe sur un lieu à l’ambiance plus que sympa. Des gens partout sur la terrasse, de tous âges, qui discutent, boivent des coups ou grattent la guitare. Tous les accents possibles et imaginables. Des grands sourires, malgré le temps dégueulasse qui invite à se calfeutrer à l’intérieur. Une super soirée faite de rencontres, de blablablablas, de tout et de n’importe quoi. On est bien là. Tellement qu’après quelques bières et la fatigue de la route dans les pattes, le van reste sur le parking et je m’y écroule comme une masse, l’air de rien. Peut-être que personne n’a rien remarqué ? En tout cas, personne ne m’a rien dit. Si les gens s’en foutent, tant mieux, ça m’arrange.

Le lendemain, après avoir pris mon p’tit dèj comme la veille à côté du van, je m’encanaille et vais squatter la douche de l’auberge. Puis la vaisselle. Puis le wifi et le canapé. Apparemment, on m’assimile au groupe de français qui a joué la veille et repart le lendemain, la tranquillité est donc assurée. Impossible, par contre, de réserver un traversier pour la suite de mon voyage avant le surlendemain. Moi qui voulais partir rapido, c’est niqué.

Quitte à être dans « la plus belle baie du monde » et après avoir cherché avec peu de réussite les baleines aux jumelles pendant deux jours (à part un groupe de bélugas vus au loin, sous la pluie, depuis les Escoumins), c’est parti pour une sortie en kayak de mer avec des gens rencontrés à l’auberge. Et là, ça a pas loupé; un béluga passe à moins de dix mètres des kayaks, en pleine baie. Le pied !

Ca bastonne un peu et le vent est costaud. On se tue bien les bras pendant plusieurs heures, mais c’est que du kiff, des bonnes courbatures bien comme il faut.

De retour à l’auberge, un groupe de bénévoles me tombe dessus. Je sens les emmerdes arriver, mais en fait non; ils veulent voir l’aménagement de mon van. Remettons les choses dans leur contexte; depuis mon départ de Montréal, le Gros a une capacité sociale étrangement très développée. Un peu comme quand tu te promènes avec un gros chien mignon, les gens veulent voir, ils posent des questions, te parlent de leurs aménagements à eux (ou de leur chien à eux, dans l’autre cas, faut suivre)… Etrange pour mon premier aménagement, mais tous les gens qui l’ont vu ont l’air de l’avoir bien aimé. Même l’ébéniste spécialisé en ameublement sur mesure rencontré à l’auberge. C’est lui qui en a parlé au reste de la troupe. Troupe qui s’agrandit de jour en jour, et se recompose au fil des arrivées et des départs des gens. La magie de l’auberge, quoi. Celle-ci a quelque chose de particulier. Un espèce de je sais pas quoi, qui fait que… Ca donne envie de rester. De se poser, au moins quelques jours.

N’empêche que ! J’avais dit, je dors aux dunes et je prends mon p’tit dèj aux dunes. Les dunes de Tadoussac, très hautes, je les ai vues l’après midi pendant la sortie en kayak. Elles sont vertigineuses, le camping y est interdit mais c’est pas ça qui va m’empêcher d’y aller. On m’a indiqué un petit chemin pour accéder à leur sommet. A 1h du mat’, après une soirée sur la plage en compagnie de quelques gens de l’auberge qui m’ont embarquée, je récupère le van et fonce vers le sable des dunes, plus haut en dehors de Tadoussac. Ce qui devait arriver arriva, après un énième demi-tour fortuit sur le mauvais chemin pour éviter un bourbier, la bestiole refuse d’avancer. Trois désenssablages successifs ne le font avancer que de quelques centimètres. Je fume une clope en contemplant les dégats, et en sachant pertinemment que je vais passer la nuit là. Par contre, je suis pas rendue aux dunes. Et ça, ça fait chier.

Après une courte nuit de grommelage sur ma connassité notoire, c’est reparti pour le désenssablage, sans plus de réussite que la veille. Une voisine qui passait par là, sa tasse à café à la main, propose de m’emmener en ville et me dépose au garage. Aucune envie de payer la dépanneuse pour ça ! Crevarde un jour, crevarde tous les jours. On va y aller à la méthode Boulette; Salut, j’suis un peu dans la merde, est-ce que tu peux m’aider ?

Je vous entends d’ici vous foutre de ma gueule. N’empêche qu’après deux échecs, la troisième personne à qui je demande un coup de main dégaine son cellulaire et appelle son mari qui travaille au quai du traversier. Celui-ci rapplique en cinq minutes avec son pick up et une corde, me ramène à la zone de bêtise sinistreuse, et me sort de là en claquement de doigts. Je lui offre les deux bières qu’il me restait dans le van et le remercie autant que je peux. Il repart avec le sourire. Les Québécois sont formidables. Les gens, en fait et en général, sont formidables. Il suffit de tomber sur les bonnes personnes. Keep the smile, c’est contagieux.

J’avais dit petit dèj sur les dunes. Je suis donc allée prendre mon petit dèj sur les dunes. Têtue, bornée, et affamée. Là bas au moins, le parking c’est du caillou. Si malgré mes recommandations, vous décidez de venir à Tadoussac, faites comme les gens d’ici; venez pour les vacances et ne repartez pas. Ou alors, juste en hiver. Et moi ? Boarf, je suis encore en train de squatter le canapé de l’auberge, et la prise de courant, et le wifi… Vous n’avez rien vu.


Isle aux Coudres and co.


Ostie qu’elle est sévère cette gueule de bois ! Depuis quand j’avais pas capoté comme ça ? Un bon moment. Il me faut un coin tranquille pour traîner mon mal de crâne et passer une soirée reposante. Direction l’Isle aux Coudres, à 1h30 au nord de Québec. On m’a dit que le traversier pour y accéder est gratuit. En quinze minutes, la traversée est bouclée sous le soleil de début d’après midi. Le Gros est en bonne place pour s’élancer sur l’île. 

Le pauvre Gros, il avait bien besoin de ces quinze minutes de repos. Ca se voit pas comme ça mais il est épuisé, après une formidable pente à 18% juste avant d’arriver au port. Son vieil ABS et ses disques fatigués n’ont pas du tout aimé l’épreuve du freinage soutenu, et si mes plaquettes étaient neuves en haut de la côte, mon nez m’a confirmé qu’elles ont fondu pendant la descente. Ambiance barbeuk dans les roues…

Ca m’empêche pas de faire tranquiloute le tour de l’île pour voir ce qui s’y passe. Pas grand chose. Une… Pardon ? Dégustation de cidre de glace ? Au point où j’en suis, avec plaisir. La gérante de la cidrerie insiste pour tout me faire goûter; cidre de glace, mélange de plusieurs variétés de pommes, liqueurs, cidres traditionnels… C’est bien bon tout ça, mais ça fait pas passer le mal de tronche. L’île n’est pas spécialement photogénique, et la lumière est franchement trop dégueulasse pour prendre des photos. Je me promène sur la plage en commençant à me demander où je vais me poser le soir, l’île étant essentiellement constituée de terrains privés et de chemins de forêt où il ne faut pas se garer.

Dix minutes d’errance plus tard, voilà pas que je tombe sur… un West ! Et un autre camion aménagé ! Garés tranquiloute sur le seul spot praticable à côté de la plage, je parque le Gros à côté d’eux et réveille le neurone de l’incruste. Deux familles de Québécois en vadrouille avec leurs gamins m’accueillent avec un grand sourire.

Merde, des gamins… Ceux là ont l’air marrants et m’adoptent assez rapidement. En fait, c’était l’appareil photo qui les intéressait. Je le leur prête en gardant un oeil dessus. Une ribambelle de photos floues squatte maintenant ma carte mémoire, mais pour une fois on voit ma tronche !

Non je n’enlèverai pas ma casquette. Ma crête étant définitivement morte, c’est un paillasson policé qui a pris racine sur ma tête, ce qui m’a suffi à décréter ça immontrable jusqu’à nouvel ordre. Et puis c’est utile contre les bibites. Ne rigolez pas, les bibites, ça pique. Et ça adore prendre son repas de sang humain quand ces imbéciles se massent autour d’un feu de camp.

-Et… On est ta première rencontre québécoise pas prévue depuis que t’es partie de la ville ? Ca fait plaisir ?

-Mets-en qu’ça fait plaisir.

-Ostie qu’elle parle québécois la française ! Allez viens, on fait tourner !

(Papa, maman, ne lisez pas ça, promis elle était bonne et bio)

Première nuit officielle dans le van, hey ma gueule j’me suis fabriqué un hôtel 6000 étoiles ! Quel pied le p’tit dèj au cul du camion… Malheureusement, la pluie s’invite assez raidement aux festivités, et je quitte l’île sous des trombes d’eau. Prochaine étape; Tadoussac !

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